Si vous avez regardé l’émission Cash Investigation sur les plastiques, vous avez entendu parler des retardateurs de flamme bromés (RFB). Je vous propose donc de faire un point sur ces retardateurs. A quoi servent-ils exactement? Dans quels produits sont-ils utilisés? et enfin quel est leur impact sur notre santé et l’environnement?
Définition et intérêt des retardateurs de flamme
Le feu a toujours été une des grandes peurs de l’homme. Cependant les incendies restent fréquents puisqu’il en survient un toutes les 2 minutes en France. Par ailleurs un incendie sur quatre est d’origine électrique. On comprend ainsi aisément que tout est fait pour empêcher ou ralentir la survenue de ces incendies.
Les retardateurs de flamme sont des substances ignifuges, c’est à dire qu’ils inhibent ou retardent la formation de flammes quand ils sont en contact avec de la chaleur. Il existe un grand nombre de retardateurs de flamme mais les bromés sont les plus utilisés en Europe. Parmi les retardateurs de flamme bromés on note également plusieurs catégories: les polybromodiphényléthers (PBDE) (En fonction du nombre de cycles, des penta-BDE, octa-BDE et déca-BDE), le tétrabromobisphénol A (TBBPA) (évidement dès que j’entends bisphénol A je fais AIE!), les polybromobiphényles (PBB).
Ces retardateurs de flamme se trouvent dans beaucoup de produits courants de notre environnement comme: les appareils électriques, (les télévisions, les ordinateurs, les appareils de cuisine… ) susceptibles de chauffer et de provoquer un feu électrique, les matériaux de construction (les matériaux d’isolation…), les textiles de la maison, par exemple les rideaux, moquettes, les meubles rembourrés canapés, matelas…
Mais aussi et c’est embêtant, les jouets et peluches qui bien évidement ne doivent pas être inflammables. On imagine les risques d’une peluche qui s’enflammerait au contact d’une cigarette… (On peut aussi se demander qui s’approche d’un enfant tenant une peluche avec une cigarette allumée…)
Certains professionnels du feu remettent en cause l’intérêt des retardateurs de flamme. En effet, s’ils retardent la combustion, ils augmentent aussi le dégagement de gaz toxiques comme le monoxyde de carbone. Or ces gaz sont la première cause de décès lors d’un incendie, surtout s’ils surviennent la nuit.
Présence des retardateurs de flamme bromés dans l’environnement
Les produits traités aux retardateurs de flamme en dégagent en permanence, de leur production et utilisation jusqu’à leur destruction ou leur recyclage. Ils contaminent ainsi le sol, l’eau et l’air.
La première source de contamination pour l’homme est alimentaire: on retrouve des RFB dans les produits d’origine animale où ils s’accumulent dans les graisses. Vous pouvez donc en ingérer en mangeant de la viande, du poisson et du lait. Les nourrissons quand à eux sont exposés via le lait maternel qui en contient aussi des traces.
Inhalation ou ingestion de poussières. Quand votre télévision chauffe son boitier ignifugé émet des RFB qui se retrouvent dans les poussières. Des études ont également montré une corrélation entre les concentrations dans les poussières des sols des chambres à coucher et celles des matelas utilisés dans ces chambres.
Risques pour la santé
Les effets sur notre organisme ne sont pas encore tous connus et il existe peu de données sur l’homme.
De nombreuses études chez l’animal montrent un effet de perturbateur endocrinien, notamment sur la thyroïde. La fonction thyroïdienne étant impliquée dans de nombreuses autres fonctions, il existe également des effets indirects sur la reproduction, et plus particulièrement sur le déroulement de la maturation sexuelle, sur le développement de l’embryon et sur l’activité neurocomportementale des nouveau-nés. Une augmentation des cancers du foie est retrouvé chez des souris après ingestion de PBDE à forte dose.
Chez l’homme, des études épidémiologiques ont montré que les enfants de mères ayant une concentration importante de PBDE pendant la grossesse, avaient un risque plus élevé de déficits du QI et des troubles de l’apprentissage et de la concentration. On note également un faible poids de naissance, un faible tour de tête et de poitrine. En ce qui concerne le risque de survenue de cancers chez l’homme, les données actuelles sont insuffisantes pour le CIRC qui a classé les RFB dans le groupe 3.
La principale source de contamination humaine étant l’alimentation, l’agence européenne de sécurité des aliments est en charge de la surveillance des effets des RFB. Cette agence considère que l’exposition de l’Homme aux RFB ne présente actuellement pas de risque pour la santé humaine.
L’union européenne a d’ores et déjà adopté des mesures visant à limiter leur utilisation. Depuis juillet 2006, tous les nouveaux équipements électriques et électroniques ne peuvent plus contenir de PBB ou de PBDE, quelle que soit la concentration.
Comment les éviter
Les retardateurs de flamme sont présents partout. On en trouve même dans l’air de l’Arctique.
Il parait donc difficile de les éviter. Cependant quelques pistes.
-Éviter les produits venant hors de l’Europe, comme les peluches de Chine. La réglementation n’est pas la même.
-Quelques étiquettes affichent un « sans retardateurs de flamme »… Va falloir les chercher à la loupe.
– Éviter les mousses en polyuréthane. Elles en contiennent systématiquement
– Et comme d’habitude aérer et passer l’aspirateur pour éliminer les poussières
Sources
Athanasios Besis et Constantini Samara, « Polybrominated diphenyl ethers (PBDEs) in the indoor and outdoor environments – A review on occurrence and human exposure », Environmental Pollution, vol. 169, , p. 217–229
Tung EWY, Kawata A, Rigden M, Bowers WJ, Caldwell D, Holloway AC, Robaire B, Hales BF, Wade MG. Gestational and Lactational Exposure to an Environmentally-Relevant Mixture of Brominated Flame Retardants: Effects on Neurodevelopment and Metabolism. Birth Defects Res 2017; 109:497–512.
Stec AA, Readman J, Blomqvist P, Gylestam D, Karlsson D, Wojtalewicz D, Dlugogorski BZ. Analysis of toxic effluents released from PVC carpet under different fire conditions. Chemosphere 2013; 90:65–71.
Eskenazi et al, 2013 In utero and childhood polybrominated diphenyl ether (PBDE) exposures and neurodevelopment in the CHAMACOS study.